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La Normandie est certes une région de France qui déborde d’histoire, mais c’est aussi un havre de paix et de détente avec ses stations balnéaires réputées (Le Touquet, Cabourg, Deauville, Trouville, Fécamp, Etretat, Honfleur…), sa nature propice aux ballades à pied, à vélo ou à cheval, et de ses nombreux produits du terroir… S’étendant de Cabourg à Honfleur, la Côte Fleurie, est terriblement attractive : des stations balnéaires huppées et bien sûr fleuries, des campagnes coquettes, de longues plages et des paysages oscillant entre gris et vert… Qui n’a jamais entendu parler de Deauville, connue pour son festival de cinéma américain, ses planches et ses stars, le luxe de ses palaces et l’extravagance de ses casinos… A seulement deux heures de route ou de train de Paris, la Côte Fleurie est une destination idéale pour le week-end et un repère de Parisiens en vacances…

Honfleur, son « Vieux Bassin »

La petite ville maritime de Honfleur située à l’est de la Côte Fleurie, sur l’estuaire de la Seine, est chargée d’un riche patrimoine historique, culturel et artistique. La première mention écrite attestant de l’existence de Honfleur revient à Richard III, duc de Normandie, en 1027. Quant à Charles V, il fit fortifier la ville afin de fermer l’estuaire de la Seine aux Anglais, avec l’appui du port voisin de Harfleur. La ville d’Honfleur est surtout connue pour son Vieux Bassin, ce port pittoresque avec ses vieilles maisons hautes aux façades recouvertes d’ardoises, maintes fois représentée par des peintres, comme Gustave Courbet, Eugène Boudin, Claude Monet ou encore Johan Barthold Jongkind, formant « l’École de Honfleur » qui contribua à l’apparition du mouvement impressionniste. Les lumières changeantes du ciel qui ont inspiré ces peintres de talent et tant d’autres, on ne peut que les admirer à notre tour lorsque le soleil décline sur l’horizon. Se rendre à Honfleur, c’est un peu comme se retrouver au cœur d’une vieille carte postale. Cet endroit vous transporte un siècle en arrière et vous invite à flâner: ruelles pavées, façades à colombages, hautes maisons étroites aux étages en saillie (certaines atteignent 7 niveaux avec seulement deux fenêtres en façade), maison à l’architecture typique, comme l’ancienne demeure du lieutenant du roi, la Lieutenance, seul vestige important des fortifications… Autre vestige de ce qui constituait les remparts de la ville, la Porte de Caen, datant du début du 17ème siècle, est surmontée d’une niche, contenant une statue de la Vierge (Notre-Dame du Port). Elle est aussi flanquée de deux tourelles en encorbellement, décorées des armes de la ville.

Honfleur, lumières changeantes du ciel

Le Vieux Bassin qui sert aujourd’hui à la fois de port de pêche, de commerce et de port de plaisance est chargé d’histoire. Imaginez que c’est d’ici que Samuel de Champlain partit pour une expédition en 1608, aboutissant à la fondation de la ville de Québec ! Moins glamour, le port fut aussi la base de départ de multiples expéditions françaises partant saccager les côtes anglaises… avec notamment la destruction partielle de la ville de Sandwich (Comté de Kent) dans les années 1450. Sur l’un des quais du port se trouve l’église Sainte-Catherine, la plus grande église en bois de France. Sa particularité ? Les nefs sont en forme de coques de bateaux, et le clocher est totalement séparé de la construction principale ! Enfin, n’oubliez pas de vous arrêter pour siroter une bolée de cidre (c’est pas avec ça que vous serez « saoul comme une téque » – ivre) et déguster une tarte normande (avec des pommes et de la crème fraîche, et un peu de calvados bien sûr)… Un autre des plaisirs simples et agréables que vous offre le vieux Honfleur. « N’ayez pas l’air tout jugé » (Ne restez pas interdit ou bête) si on vous propose de goûter la teurgoule, spécialité normande par excellence. Ce dessert (où le riz et le sucre sont noyés dans du lait entier) est cuit dans un four à feu doux pendant de longues heures. Selon les manuscrits historiques, la teurgoule serait originaire de Honfleur. La mémoire populaire veut que l’inventeur du dessert soit François Orceau de Fontette (1718-1794) qui fit importer du riz et des épices en Normandie afin d’éviter une disette dans le pays d’Auge et mettre fin à la menace d’émeutes populaires. Quant à l’origine du nom, « se tordre la goule, la tête » en normand, plusieurs explications sont avancées mais j’ai un petit faible pour celle-ci: mangée encore chaude, la teurgoule fait tourner la tête ou bien est-ce le goût de la cannelle, épice inconnue, qui « tord la goule » du normand ?

Une bolée de cidre ?

C’est en janvier 1995 (après 7 ans de travaux) que le pont de Normandie fut officiellement inauguré, réunifiant les deux Normandie (la haute et la basse). Ce pont à haubans, lancé au-dessus de l’estuaire de la Seine, est aussi long (2141 mètres) que les Champs Elysées et relie Honfleur au Havre. « Atmosphère, atmosphère » aurait dit Arletty. Tout est une question d’atmosphère et celle-ci met en valeur l’impressionnante structure de béton et de métal. Dans une ambiance orageuse où la lumière perce çà et là, le plafond bas des nuages, les deux pylônes en Y-inversé (214.77 mètres de haut), apparaissent comme deux géants enracinés dans le sol, tels des vigiles surveillant l’océan. Quant aux câbles Freyssinet (composés de 31 à 53 torons d’acier) ils ressemblent de loin à de fines cordes, sur lesquelles on s’imagine tirer pour hisser la grand voile d’un immense navire et prendre le large… En traversant le pont, on se retrouve « de l’aut’ côté d’l’eau »… « A l’avantage » (aurevoir) la Côte Fleurie et « Boujou » (bonjour) la Côte d’Albâtre…

Etretat, aiguille et arche

Passé la ville du Havre, on découvre peu à peu le gris pierre du ciel, le bleu vif de l’océan et le blanc laiteux de la craie de la Côte d’Albâtre. Cette côte doit son nom aux 140 kilomètres de falaises crayeuses situées entre l’estuaire de la Seine et celui de la Somme. Les falaises normandes semblent s’arracher des flots, tels des remparts increvables face à l’océan qui les assaille à coup de sel et de ressac furieux ! Dans ce combat qui dure depuis des siècles, l’océan gagne un peu chaque jour en s’insinuant patiemment, il sape, il ronge, il creuse des grottes, il perce de hautes arcades ou découpe dans la masse des rochers isolés… C’est à Etretat, immortalisé dans la littérature par Maurice Leblanc dans « L’aiguille Creuse », que l’on trouve les falaises crayeuses les plus pittoresques. L’Aiguille Creuse d’Etretat, les tours blanches de l’Abbaye de Jumièges, le vieux phare de Tancarville, les îles englouties de la Seine… autant de lieux mystérieux dont les énigmes sont percées à jour par Arsène Lupin ! Et là, nous faisons face à la légendaire falaise d’Aval, avec sa silhouette séduisante, qui a inspirée tant de peintres (Claude Monet, Gustave Courbetou) et d’écrivains (Maurice Leblanc bien sûr et plus récemment Michel Bussi). N’est-ce pas le célèbre Guy de Maupassant qui décrivit la falaise et la porte d’Amont comme « un éléphant qui trempait sa trompe dans les flots ». C’est vrai qu’avec un peu d’imagination… Quant à Victor Hugo, il décrivait la falaise d’Aval en ces termes dans « Une lettre à Adèle » : « Ce que j’ai vu à Etretat est admirable. La falaise est percée de distance en distance de grandes arches naturelles sous lesquelles la mer vient battre dans les marées. J’ai attendu que la marée fut basse, et, à travers les goëmons, les flaques d’eau, les algues glissantes et les gros galets couverts d’herbes peignées par les flots qui sont comme des crânes avec des chevelures vertes, je suis arrivé jusqu’à la grande arche, que j’ai dessinée ». C’est vrai que l’impressionnante arche d’Aval (haute de 80 mètres), sculptée par la nature, offre un panorama à couper le souffle. Et comment ne pas succomber au charme de la mystérieuse aiguille, haute de 51 mètres, qui se dresse un peu plus loin dans les flots. Est-elle vraiment creuse et a-t-elle abrité le Trésor des Rois de France découvert par Arsène Lupin ? A vous de le découvrir…

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